FIA KARTING INTERVIEW - BERTRAND PIGNOLET

FIA KARTING INTERVIEW - BERTRAND PIGNOLET

30/04/2020 - Informations

Le Français Bertrand Pignolet est à la tête de l’un des plus grands constructeurs mondiaux de karts. L’entreprise Sodikart fondée par Gildas Mérian partage son activité entre le karting loisir et la fabrication de châssis de compétition. Les karts Sodi brillent au plus haut niveau international en KZ et KZ2 tout en accentuant leur implantation dans toutes les autres catégories. Sodikart est également impliquée dans l’organisation de courses à travers son département 3MK Events. Cet entretien avec Bertrand Pignolet a été réalisé en avril 2020 alors que le COVID-19 paralyse une grande partie de la planète.

POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DU FONCTIONNEMENT ACTUEL DE SODIKART ?
À ce jour, cela se passe au mieux que nous pouvons. L’entreprise a été mise au chômage partiel dès le 17 mars afin de préserver la santé de son personnel. Nous avons la chance de nous situer dans l’ouest de la France qui n’a pas été gravement touché par le virus. Je suis bien conscient que la situation est beaucoup plus sévère dans d’autres régions ou d’autres pays, nos pensées accompagnent toutes les familles qui ont été frappées par le COVID-19.

Nous avons pu assurer un service minimum depuis le 1er avril afin d’expédier des pièces à nos clients qui en faisaient la demande. Depuis le 14 avril dernier, nous avons recommencé à produire avec des équipes réduites. Nous assemblons de nouveau des karts de compétition et de loisir. Sodikart possède une forte ouverture internationale et certains pays nous demandent de les livrer. Certains n’ont jamais été confinés, d’autres commencent à être déconfinés. L’usine fonctionne pour l’instant à environ 40 % de sa capacité et de son effectif.

Nous avons bien entendu mis l’accent sur la protection sanitaire de tous nos collaborateurs, notre priorité absolue, grâce aux gestes barrière, à la mise à disposition de gel hydroalcoolique et au port de masques et de gants. La production a ainsi pu redémarrer, à la satisfaction des équipes.

DE QUELLES MANIÈRES VOUS ÊTES-VOUS ADAPTÉ À LA CRISE SANITAIRE ?
Très rapidement, grâce à la réactivité d’un de nos collaborateurs R&D, Sodikart a mis sa capacité d’impression 3D au service des hôpitaux et des soignants de la région nantaise en réalisant des masques et des supports de visière de protection. C’était un devoir moral pour nous.

Nous avons également mis en place en quelques semaines, à travers notre département événementiel 3MK Events, un championnat E-Sport qui remporte un grand succès en France. Nous n’avons rien à gagner financièrement sur cette opération, mais il nous paraissait important de contribuer à renforcer la communauté du karting qui, pour cause de confinement,  ne peut plus se retrouver autour des pistes. Notre but était principalement de maintenir le lien entre tous les acteurs du milieu en leur permettant de s’amuser un peu et de retrouver les sensations de la course, même si les jeux en ligne n’ont rien à voir avec la vraie compétition karting.

Enfin, nous sommes ravis de voir le succès de Bas Lammers sur les réseaux sociaux et au-delà grâce à son programme de préparation physique très suivi. Il remplit parfaitement sa mission d’ambassadeur de Sodikart au sein de la communauté sportive. Il sait mettre en valeur toutes les qualités que l’on apprécie chez lui. Sa joie de vivre, son dynamisme et son charisme, mais aussi son implication totale dans le sport et son fair-play légendaire. Je suis persuadé qu’il est devenu plus que jamais un modèle sportif tout en continuant à incarner un sportif modèle. Cela dit, nous attendons comme lui avec une impatience à peine dissimulée de le voir exprimer tout son talent sur un circuit parce que c’est là qu’il excelle le plus.

COMMENT ENVISAGEZ-VOUS LA REPRISE DE LA COMPÉTITION KARTING ?
J’ai l’honneur de participer au groupe de travail sportif de la CIK-FIA, nous nous sommes réunis il y a quelques jours en visio-conférence. Nous avons pour l’instant essayé de repositionner un maximum de compétitions dans la 2e partie de la saison. À mon avis, il sera cependant difficile d’envisager la tenue de courses internationales en Italie, en Espagne ou en France avant la fin du mois d’août. Apparemment, certaines administrations territoriales ont déjà indiqué qu’elles ne délivreraient pas d’autorisation avant septembre. Le problème ne vient pas de la concentration de personnes sur un circuit, parce que les courses ont lieu en plein air et que les gestes barrière bien appliqués limitent les risques. C’est la mobilisation de ressources sanitaires comme les ambulances, médecins, secouristes, pour des activités non prioritaires qui pourrait retarder la reprise.

D’autre part, pour les compétitions internationales, se pose le problème des possibilités de déplacement des participants en fonction de leur pays d’origine selon les décisions administratives  de chaque état, ainsi qu’en ce qui concerne les capacités aériennes. Quelle serait la valeur d’une compétition internationale, d’un championnat du monde, si les représentants de plusieurs pays ne pouvaient pas s’y rendre ? Cela pose un problème éthique et sportif, au-delà d’un problème sanitaire. Cela reste une grosse interrogation à l’heure actuelle. Dans ces conditions, il est compliqué de préparer un calendrier regroupé sur quatre mois. J’espère que l’on pourra maintenir un maximum de dates de Championnat d’Europe en OK et Junior, ainsi qu’en KZ, KZ2 et surtout les Championnats du Monde. Malheureusement, rien ne garantit aujourd’hui que l’on pourra tout faire. 

COMMENT ÉVALUEZ-VOUS ACTUELLEMENT LES CONSÉQUENCES POSSIBLES DE LA PANDÉMIE ?
ll y a plusieurs parties à évoquer pour tenter de répondre à cette question. Tout d’abord, l’impact sanitaire va dépendre des remèdes que l’on va pouvoir développer face à cette maladie et de la rapidité avec laquelle traitements ou vaccins pourront en limiter l’ampleur. Cela reste la principale inconnue à ce jour.

Il est évident, d’autre part, que l’incidence économique sera forte dans le monde entier. Il n’est besoin que de prendre connaissance de l’augmentation brutale du nombre de chômeurs depuis quelques semaines. Il est cependant quasiment impossible de prédire l’amplitude et la durée de ses effets sur la santé des états ou celle des marchés.

Enfin, étant d’un naturel optimiste, je pense que l’impact psychologique d’une telle crise amènera aussi des opportunités pour qui veut bien les saisir. De nombreuses personnes, actuellement confinées, ont le temps de réfléchir et peut être de redéfinir leurs priorités dans la vie... certains se replieront peut être sur eux-mêmes, mais je suis persuadé que beaucoup d’entre nous, après la fin de cette crise sanitaire, vont tout simplement profiter de la vie en étant conscients de la chance que nous avons d’être tout simplement en bonne santé. J’espère ainsi que la pratique des loisirs sportifs en général, et du karting en particulier, va pouvoir de nouveau se développer et attirer des jeunes talents dans le monde entier !

© Photo FIA Karting / KSP

FIA INTERVIEW : https://www.fiakarting.com/news/fia-karting-interview-director-sodikart-bertrand-pignolet